Cause principale de burn-out après 50 ans: un conflit de valeurs
«55 ans… encore 10 ans à tirer». est une remarque que j’ai entendue dans mon cabinet. Mais contrairement à ce qu’on pourrait imaginer, cette vision est très rare dans les consultations pour burn-out au-delà de 50 ans. Les patients de cet âge pensent plutôt que c’est le dernier moment pour réaliser leur idéal, leurs valeurs dans le travail, espoir d’être encore utile et de faire bénéficier les compétences professionnelles acquises dans leur carrière.
J’entends dire qu’avec les années d’expériences professionnelles, on devrait savoir gérer le stress et ne plus risquer le burn-out… Ce n’est pas tout à fait la réalité. Il existe des facteurs de risque différent au-delà de 50 ans.
A cet âge, il devient évident que le corps ne fonctionne plus comme à 20 ans
La récupération est beaucoup plus lente, l’usure du corps rend vulnérable aux changements de rythme, décalages horaires, stress ambiant, confrontations. A 50 ans, le corps n’est plus aussi solide, il est absolument nécessaire d’apprendre à le protéger, d’accepter d’avoir besoin de travailler autrement. Ainsi, le besoin se fait ressentir d’être moins au front, plus en retrait des confrontations du terrain pour jouer davantage un rôle de conseil, de supervision des jeunes, de transmettre ses expériences, son savoir-faire.
Léonard*, directeur de département RH de 52 ans, après 20 années d’une belle progression dans la même banque, s’est retrouvé dans un épuisement professionnel très avancé et très grave. La cause principale était un conflit de valeur: lui désirant soutenir l’humain dans l’entreprise, ses collègues ayant une vision très financière et froide. En voyant les « jeunes loups » arriver dans l’entreprise avec une volonté affichée de réussir, il se disait: «ma carrière est réussie, j’ai largement prouvé que je pouvais réussir, j’ai sacrifié une partie de ma vie privée, j’ai parfois dû faire des compromis avec mes valeurs profondes, j’ai reçu une reconnaissance sociale, j’ai réalisé de beaux projets… et alors?»
La clé est dans ce «…et alors?»
Alors… Au-delà de 50 ans, un bouleversement intérieur s’amorce, nos valeurs qui étaient centrées sur nous-mêmes évoluent vers une vision globale, un désir de contribuer au monde autrement.
Les valeurs essentielles se positionnent en premier plan, il devient beaucoup plus difficile de faire des compromis, une nécessité intérieure d’agir en fonction de ces valeurs émerge. Les priorités de vie se transforment aussi, l’idéal à réaliser évolue autrement, la question de l’essentiel de notre vie devient dominante: «j’ai déjà vécu plus de la moitié de ma vie, qu’est-ce que je souhaite vivre?»
«Et alors?» Léonard réalise qu’il ne pourra pas réaliser et agir ses valeurs profondes au sein de la banque, les possibilités sont trop restreintes et cela l’a épuisé. Il décida de prendre les 3 mois sabbatiques auxquels il avait droit de part son poste et son engagement durable dans l’entreprise. Ce temps lui a permis de mettre en œuvre ses valeurs humanistes dans un voyage à l’étranger. De retour de ce congé très enrichissant, il a acquis une sérénité intérieure, une saine distance avec son travail, un investissement modéré dans son poste car il était évident pour lui que la priorité de sa vie n’était plus la réussite dans son travail…
Quelques chiffres de terrain de ma pratique de cabinet
- Environ 15% des victimes de burn-out ont entre 50 et 60 ans
- Plus de 50% des burn-out sont causés principalement par un conflit de valeur
- Plus de 80% sont des cadres ou chef d’entreprise
(*prénom d’emprunt)